asut-Bulletin
Smarte Netze für eine smarte Schweiz
Ausgabe
03/2024
De chaque sommet de montagne, on atteint le monde

Interview avec Fritz Sutter, ancien président de l'asut

C'est un fin connaisseur de la branche des télécoms locale et « un réseauteur par excellence » : Fritz Sutter, ancien président de l'asut et initiateur de la ICT-Networkingparty sur les réseaux et la mise en réseau en Suisse.

asut: Si vous regardez en arrière: Les réseaux de télécommunication se sont-ils développés comme vous l'aviez imaginé il y a 50 ans?

Je ne me suis pas posé la question à l'époque. Nous avions deux enfants en bas âge et j'avais des tâches intéressantes chez IBM, dont les télécommunications faisaient partie pendant un certain temps. De plus, en tant qu'officier des troupes de transmission, j'avais à faire plusieurs semaines par an avec des réseaux militaires. Nos stations radio et nos radiotélégraphes cryptographiques étaient installés dans des bus VW et le trafic de télégrammes était chiffré.

En matière de télécommunications, la Suisse est-elle là où elle devrait être aujourd'hui?

Notre pays est très bien positionné. Dans le dernier «IMD World Competitiveness Yearbook», qui classe 67 pays, nous occupons la troisième place dans le domaine de l'«infrastructure technologique». Je me rends de temps en temps en montagne: il ne me vient pas à l'esprit une cabane du CAS d'où l'on ne puisse pas joindre le monde par téléphone ou par Internet.

Mais pourrons-nous conserver notre place sur le podium? Le Tribunal fédéral vient de décider que les installations 5G ne pourront pas rayonner plus fortement sans autorisation. Selon l'asut, cela va fortement retarder une couverture mobile adaptée aux besoins des clients avec une technologie efficace et moderne. Qu'en pensez-vous ?

Eh bien, même les tribunaux prennent de temps en temps des décisions qui font froncer les sourcils et qui défient bon sens. Les procédures supplémentaires d'autorisation de construire pour quelque 3000 antennes 5G déjà existantes que leTribunal fédéral exige sont superflues, à vrai dire. Cette mesure me fait penser à l'interdiction des voitures dans le canton des Grisons à l'époque. Le gouvernement cantonal avait alors interdit la circulation des automobiles sur toutes les routes du canton. Les voitures devaient être transportées sur des charrettes tirées par des chevaux ! Cette interdiction a été levée 25 ans plus tard lors d'une votation populaire.
 

 

Lorsque les Grisons ont voulu interdire la voiture. Tract des opposants à l'automobile de 1925 (photo : ACS).
 

Des quantités de données toujours plus importantes, davantage de connexions simultanées, des exigences élevées en matière de transmission de données, des services toujours plus axés sur les données – tout cela nécessite aussi des réseaux toujours plus intelligents. Mais en même temps, un certain scepticisme technologique grandit au sein de la population. Comprenez-vous ces réticences?

Je doute que le grand public se méfie des technologies modernes ; bien au contraire, il les utilise plus que jamais. Qu'il s'agisse de jeunes ou de moins jeunes, de femmes ou d' hommes: il y a même bien plus de gens qui parlent que de gens qui écoutent! Quand je vois et surtout quand j'entends combien les gens autour de moi parlent de tout et de n'importe quoi au téléphone autour de moi dans les trains, les trams et les bus, je ne me fais vraiment pas trop de souci pour cela.

Mais personne ne souhaite avoir une antenne derrière, devant ou à côté de sa maison. Actuellement, quelques milliers d'oppositions au niveau cantonal et communal bloquent l'extension du réseau 5G. On dirait que le secteur des télécommunications peine à lever les réserves de la population?

Je n'apprécierais pas non plus qu'une antenne soit placée devant, derrière ou à côté de ma maison. Pas à cause du rayonnement, mais pour des raisons esthétiques. Les opérateurs de téléphonie mobile ont reconnu le problème et s'efforcent de trouver des emplacements d'antennes appropriés. Il est d'ailleurs peu connu dans ce contexte qu'environ 90 % du rayonnement ne provient pas des antennes relais, mais de son propre téléphone portable.Il arrive que le thème soit traité de mauvaise foi : je me souviens avoir vu une fois, à Berne, dans la vitrine d'un magasin, un gilet censé protéger des radiations. Cela m'a fait penser au proverbe selon lequel les trèfles à quatre feuilles portent chance, même si l'on n'y croit pas. Ou l'inversion de la cause et de l'effet: le coq chante le matin pour que le soleil se lève.

Et qu'en est-il du point de vue de la politique  Avez-vous l'impression que le Parlement ait conscience de l'importance centrale de l'infrastructure de télécommunication pour le fonctionnement du pays, pour la qualité du site, mais aussi pour la qualité de vie?

Tant que tout fonctionne aussi bien aujourd'hui en Suisse, ni notre Parlement ni personne d'autre ne s'en préoccupera. Il y a des choses qui sont simplement là, comme l'air ou l'eau. Les services de télécommunication en font désormais partie. Ils sont indispensables dans les situations d'urgence. Mais malheur à eux s'ils tombent en panne, ce qui n'arrive pratiquement jamais: dans ce cas, des «mesures efficaces» seront certainement réclamées de toutes parts et de bons conseils seront prodigués de toutes parts.

Je déduis de vos réponses que vous êtes résolument optimiste et que vous pensez que la Suisse est sur la bonne voie en matière de télécommunications. L'ASUT, qui fête son 50ᵉ anniversaire cette année, y est-elle pour quelque chose ?  

Tout d'abord: oui, l'optimisme est dans mes gènes, et cela ne changera plus guère, je pense. D'ailleurs, peu de gens le savent: asut signifie «Association Suisse des Télécommunications». Cette association d'utilisateurs a été fondée en son temps par un collaborateur de l'Union de Banques Suisses, un Grison du nom de Martial Sialm. Aujourd'hui, il a plus de 90 ans et est toujours plein d'énergie. C'est lui qui, à l'époque, voulait créer avec l'asut un contrepoids au monopole des PTT. D'ailleurs, à l'époque où je siégeais au comité directeur de l'asut, ce sont surtout les questions de réglementation qui jouaient un rôle important, mot-clé «dégroupage du dernier kilomètre»: Il s'agissait de veiller à ce qu'il n'y ait pas trop de régulation. Aujourd'hui, en revanche, il s'agit davantage de créer un cadre politique, juridique et économique optimal pour l'économie numérique. A cet égard, l'asut est une voix importante.

C'est peut-être grâce à un réseau d'un tout autre genre qu'en Suisse, en matière de télécommunications, on débat souvent et volontiers, parfois avec des armes redoutables, mais qu'on finit par trouver des compromis qui tiennent la route. Je fais allusion à l'ICT-Networkingparty que vous avez créée et qui permet à la branche, à la politique et à l'administration de s'asseoir autour d'une table et surtout, de parler ensemble...

Se parler est toujours la meilleure solution. L'asut organise régulièrement des manifestations sectorielles pour les professionnels : Lunch-Forums, Member-Apéros, la conférence IoT, etc. Le  séminaire de l'asut, aujourd'hui  appelé «Swiss Telecommunication Summit», en fait également partie. C'est même de loin de la plus grande manifestation de tous les événements organisés par l'association actuellement. La prochaine édition de ce «Sommet de la Telco» aura lieu le 26 juin 2025 au Kursaal de Berne. La «ICT-Networkingparty» a été créée en 2003 comme événement d'adieu après mon départ à la retraite chez Swisscom. Les personnes invitées étaient des connaissances professionnelles, rencontrées dans le cadre professionnel ou en dehors de l'entreprise, ainsi que leurs épouses. Avec ma femme, j'ai organisé cette manifestation à plusieurs reprises par la suite. Je suis toujours étonné elle ait autant de succès aujourd'hui encore. Avec 1000 participants, le Kursaal de Berne affiche à chaque fois complet. La prochaine édition aura lieu le 23 janvier 2025.

Propos recueillis par Christine D'Anna-Huber
 

Fritz Sutter

Après un premier emploi comme employé administratif à la préfecture de Zurich, Fritz Sutter a travaillé pendant 32 ans chez IBM dans le domaine des grands ordinateurs, de la vente et du management. En 1996, il est passé à Swisscom, alors Telekom PTT, où, en tant que chef d'état-major pour les projets de changement, il a préparé le monopoliste à la concurrence et – en tant qu'homme de réseau hors pair – a entretenu les relations avec les autorités de régulation et le Parlement fédéral. Après sa retraite, Fritz Sutter, fin connaisseur du secteur des télécommunication, s'est engagé auprès de l'asut, qu'il a présidée de 2003 à 2006, de SwissICT et d'ePower. En outre, il a inventé et initié la ICT-Networkingparty – l'événement de réseautage le plus important du secteur des télécoms et de l'IT. Et comme tout cela ne suffit pas encore, Fritz Sutter a (entre autres) gravi plus de vingt sommets de plus de 4000 mètres - Cervin compris, franchi à vélo, année après année, presque tous les grands cols alpins, participé à deux douzaines de marathons et semi-marathons sur route, ainsi qu'à dix reprises au marathon de ski de l'Engadine.
 

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